Le modulaire, la réemployabilité par excellence

120 millions d’euros, c’est le montant investi chaque année par les administrations dans les constructions modulaires (source : Xerfi 2018). Après quelques années d’usage, alors qu’ils ont une durée de vie de 30 ans, ces bâtiments temporaires sont tous détruits, à de rares exceptions.

Établissements scolaires, bureaux, réfectoires, vestiaires, bases de chantier ou encore tribunaux provisoires, les constructions modulaires répondent à tous les besoins d’infrastructures provisoires des acteurs publics. En fin d’usage, ces bâtiments démontables sont gérés de la même manière que les bâtiments « en dur » : ils font l’objet d’appels d’offres de démolition… en parfaite contradiction avec la réglementation en vigueur.

En effet, les réglementations européenne et française demandent de privilégier les actions de réemploi devant la production de déchets :

  • la directive cadre européenne 2008/98/CE du 19 novembre 2008 hiérarchise les modes de gestion des déchets à privilégier avec la priorité donnée à la prévention des déchets : le réemploi doit être privilégié, devant le recyclage et devant la valorisation énergétique.
  • l’ordonnance n° 2010-1579 du 17 décembre 2010 relative aux déchets clarifie un certain nombre de définitions dans l’article L541-1-1 du Code de l’environnement : le réemploi intervient en première position avant la réutilisation et le recyclage dans la hiérarchie des actions à mettre en œuvre.

La réglementation en vigueur est donc bien claire sur le sujet : le déchet le plus propre est celui qu’on ne produit pas !

Alors que la réutilisation et le recyclage supposent la création d’un déchet, le réemploi vise à prolonger la durée de vie des produits. Parce qu’il ne produit pas de déchets (ou le moins possible), le réemploi doit être la priorité des Administrations.

Le réemploi, une évidence qui ne doit plus se limiter à la location

L’activité du secteur de la construction modulaire se décompose en deux segments : la location (55%) et les ventes (45%).

Dans le segment locatif, le réemploi des modules est au cœur du métier et concerne essentiellement le secteur du BTP.  En effet, pour répondre aux besoins en base de chantier de leurs clients, les fabricants déplacent leurs modules d’un chantier à l’autre ; ils les installent, les louent puis les enlèvent dans un laps de temps généralement inférieur à trois ans. Il n’y a donc bien aucun frein technique au réemploi des modules.

Mais alors, pourquoi les constructions modulaires vendues aux entités publiques finissent-elles quasi-systématiquement toutes en décharge ? Rien qu’en 2017, ce sont des dizaines de milliers de mètres carrés qui ont été démolis : 2.300 m² détruits par la Cour d’Appel de Colmar, 4.900 m² détruits par l’Agence Pour l’Immobilier de la Justice (APIJ), 5.300 m² détruits par la Région Ile-de-France, 1.600 m² détruits par les la mairie d’Asnières-sur-Seine, 1.600 m² détruits par le Département des Hauts-de-Seine à Clichy, etc.

Alors que l’exemplarité des Administrations au regard du développement durable est une priorité, cette liste non-exhaustive de bâtiments démontables démolis est édifiante.

Nous voyons deux raisons à ces destructions de masse modulaire :

Tout d’abord, les ventes d’occasion représentent moins de 2% du marché (soit ~ 50.000 m²) et ne concernent que les petites surfaces (voir les annonces publiées sur LeBoncoin). Trouver un repreneur pour des modules en l’état ne s’improvise pas. La recherche d’un projet de réemploi doit s’inscrire dans une démarche d’anticipation, car un module seul n’a de valeur que si on lui associe une prestation de démontage, transport, remontage et rénovation éventuelle.

Pour preuve les surfaces modulaires vendues par France Domaine ces 30 dernières années s’élèvent à moins de 1.000 m² ! Pour preuve encore l’appel d’offres infructueux lancé par l’APIJ pour l’achat et l’enlèvement en 2017 d’un bâtiment modulaire de 4.900 m², un bâtiment conforme à la norme RT 2012 acheté 8,3 millions d’euros, utilisé 4 ans, puis finalement détruit pour 350.000 euros !

Ensuite, les Administrations ont été habituées à payer pour détruire leurs bâtiments démontables. Les cahiers des charges de démolition et de traitement des déchets sont « prêts à l’emploi ». Cette situation perdure aussi parce qu’elle profite aux fabricants de modules, aux entreprises de démolition et aux spécialistes du traitement de déchets. Tous ont intérêt à ce que cette situation n’évolue pas : les fabricants peuvent faire tourner leurs usines (situées en France ou à l’étranger) et la production de déchets alimente la filière.

Et si on parlait de réemploi avant de parler de recyclage ?

Le BTP, c’est 250 millions de tonnes de déchets par an (Source : ADEME). C’est aussi 70 % de la production de déchets en France (Source : CGDD). Face à ce constat, un nouvel impératif s’impose aux acteurs publics : cesser la démolition systématique des constructions modulaires, et favoriser la préparation en vue de leur réemploi.

Parce qu’ils sont démontables, transportables et réadaptables, les bâtiments modulaires ne doivent plus finir en décharge. Peu importe qu’ils soient partiellement recyclables, il convient de permettre leur réemploi jusqu’au terme de leur durée de vie (soit 30 ans) avant d’envisager de les démolir.

C’est d’autant plus vrai que la mise en œuvre d’une solution de réemploi en amont de la fin d’usage d’un bâtiment modulaire a de multiples intérêts pour son propriétaire. En effet, en permettant ce réemploi, l’acteur public :

  • fait supporter par un tiers les coûts d’enlèvement des modules,
  • évite la mise en décharge des modules et les frais associés,
  • évite la consommation de ressources liées à la fabrication de modules neufs,
  • se conforme aux réglementations européenne et française en matière de prévention des déchets et
  • crée de l’activité pour des emplois locaux non délocalisables.

Quelles actions préalables pour obtenir ces bénéfices ?

Pour viser ces résultats, les Administrations doivent préalablement mettre en œuvre des actions simples telles que :

  • référencer leur patrimoine modulaire ;
  • anticiper la fin d’usage de leurs bâtiments temporaires ;
  • sensibiliser au respect du Code l’environnement les directions impliquées (commande publique/achats, directions des bâtiments et de l’immobilier, services techniques, etc.) ;
  • mettre en place des procédures d’achat adaptées au réemploi.

CampoSPHERE accompagne tous les acteurs publics qui souhaitent s’engager dans une démarche éco-responsable en permettant une seconde vie pour leurs bâtiments modulaires. En savoir plus

Ces deux dernières années, en collaborant avec CampoSPHERE, les propriétaires de bâtiments modulaires ont obtenu des résultats significatifs :

  • 8.000 m² sauvés de la destruction,
  • plus de 1.000 tonnes de déchets évités,
  • 320.000 euros d’économies, et
  • 12 ETP (Équivalents Temps Plein) créés.

Pour ceux qui en doutaient encore, les bénéfices économiques, écologiques et sociétaux du réemploi sont bien réels.